Sur Le Bravo du Titien (Vienne), pour le plaisir de lire « du Michon », en attendant le plat de résistance…
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Il existe au musée de Vienne un petit mais très beau, viril et crapuleux tableau, que Berenson aimait beaucoup et qu’on appelle « Le Bravo ». Un bravo, ce mot n’a plus cours, on préfère dire nervi, ou homme de main, ou second couteau. Le couteau, justement, le tueur le tient caché dans son dos, en bon copain. Il met fraternellement la main sur l’épaule de sa victime assurée, qui tourne vers lui un visage mécontent. Pénombre, il peut être trois heures du matin. Aucun des deux acolytes n’attire notre sympathie: le futur assassiné est un fêtard qui revient de beuverie, des lauriers dans les cheveux, des traits à la fois mous et impérieux, mauvais mélange. L’assassin n’est pas non plus joli-joli, il a les mains comme des battoirs et le profil perdu du trente-sixième violon qu’il est, il tient à sa petite peau comme l’atteste sa cuirasse, et il planque son couteau. Ce tableau m’a inspiré quelques réflexions sur nos réseaux.
Les voici:
le rival excédé se reconnaît à ceci: il ne répond pas à vos demandes d’amitié. Il tient à vous porter le coup dans l’ombre, à trois heures du matin. « Je l’aurai à la loyale », a-t-il le culot de se dire. C’est un Bravo dénégatif.
La jalouse excédée est plus retorse. Elle est votre amie depuis belle lurette. Elle omet avec ostentation d’apercevoir à vos posts qu’une rivale est victorieuse. C’est une Brava dégourdie et démasquable à l’instant.
Enfin le jaloux simplex, qui est souvent aussi votre « ami », est aisément repérable: il ne comprend rien à votre gestuelle et il vous porte le coup de pied de l’âne quand il vous croit à terre -le malheureux! c’est justement le moment où vous êtes déjà derrière lui, le poignard bien en main, il n’aura pas le temps de faire ses prières. C’est un Bravo maladroit
